Considérations sur la campagne de 1815
Lever de rideau : l'attaque sur Charleroi
Je n'aborderai pas les détails de cette partie initiale de la campagne. Selon François Tsas1, le plan de Napoléon était le suivant :
1°) concentrer l'armée vers le point de jonction des deux armées adverses ;
2°) placer un détachement face à l'un des adversaires et marcher contre l'autre ;
3°) attaquer cet autre, le vaincre, et le faire observer ;
4°) marcher contre le premier adversaire et le vaincre.
On ne connaît pas le plan de Bonaparte, mais la plupart des auteurs s'accordent à penser qu'il était à peu près celui-là2.
La réussite de ce plan dépend en grande partie de la rapidité de son exécution. Quelle est la situation lorsque les forces françaises s'ébranlent en direction de Charleroi ?
Les troupes anglo-néerlandaises (quoique fortement allemandes aussi avec les troupes de Hanovre) de Wellington occupent l'ouest et le centre de la Belgique. Elles sont très dispersées car le duc ignore d'où viendra l'attaque et craint beaucoup une attaque sur Mons.
Les troupes prussiennes occupent le centre et l'est, avec une plus grande densité de troupes du côté de Namur.
Napoléon attaque donc à la jointure des deux dispositifs, espérant pourvoir s'insérer entre les deux armées, ce qu'il va d'ailleurs parvenir à faire.
La seconde partie du plan va également fonctionner, quoique moins bien qu'espéré, avec l'arrêt de Wellington aux Quatre-Bras par Ney.
La troisième partie du plan n'est réalisée qu'en partie, la victoire sur les prussiens étant beaucoup moins nette que Napoléon ne le prétendra. Une question ouverte est de savoir s'il a cru à ses propres affabulations ou s'il s'agissait surtout pour lui d'en convaincre son armée3 (Napoléon n'hésitera pas, à Waterloo, à faire passer l'arrivée des prussiens pour celle de Grouchy pour motiver ses troupes à l'assaut final...). Il semble certain qu'il a convaincu nombre de ses officiers, en particulier Grouchy.
La quatrième partie se terminera en catastrophe, principalement parce que la troisième n'avait pas été menée à son terme et que personne, dans le camp français, ne semble en avoir vraiment eu conscience.
Terminons cette introduction en citant François Tsas : L'Empereur a souvent déclaré « Moi seul, je sais ce qu'il faut faire ; bornez-vous à exécuter ponctuellement mes ordres ». Le revers de cette vision des choses, c'est que l'Empereur doit aussi porter, ensuite, la responsabilité de l'exécution de ses ordres. Nous aurons l'occasion d'y revenir en plusieurs occasions.
1https://www.napoleon.org/histoire-des-2-empires/articles/ney-et-le-combat-des-quatre-bras/
2François Tsas, dans «Ney et le combat des quatre-bras», pense que le but de Napoléon était d'arriver à Bruxelles le plus vite possible.
3Bernard Coppens, dans « Waterloo, les mensonges », page 52, cite Kellermann : « Il prend ses idées pour des espérances et ses espérances pour des idées ».